Difficile succession

Dans la rue de Genève, le printemps, comme à l’accoutumée, fait son ouvrage, me dis-je. Aussi, une nuée de braves gens, déferlent dans un accoutrement qui fuit l’hiver. Sur les hauteurs du Revard, la neige qui reste n’en a plus pour très longtemps. Remarque qui retient toute mon attention. Mon dossier en main, je rejoins l’étude de Maître Camoz. Nous sommes à la fin avril et déjà six mois que mon ami est mort d’un cancer fulgurant.

Il m’avait demandé de veiller sur sa famille s’il venait à disparaître. J’ai pour habitude d’aider les gens mais là cela me touche particulièrement. Trente cinq ans que l’on se connaissait. Je ne pouvais dire non.

Poussant la porte de l’étude, je vois tout d’abord sa fille que j’appelle la p’tiote, Madeleine la femme de Yves et enfin le fils. Ils sont là, élevant un regard sur ma personne en poussant un soupir.

Je n’ai pas le temps de leur dire bonjour que Maître Camoz vient à ma rencontre et me transporte directement à son bureau. Il me fait asseoir puis, décroche son téléphone afin d’être tranquille. C’est qu’il veut me parler tout d’abord seul à seul.

On se connaît depuis longtemps, me dit-il. Figure toi que je suis embarrassé dans cette affaire. Nous avons là, une femme issue d’un second mariage, une fille émanant d’un premier mariage, et un fils reconnu par l’administration qui n’est soit disant pas celui de Yves et dont on demande la recherche génétique. Que peux tu me dire et qu’en penses tu ?

Personnellement, j’ai toujours entendu Yves me dire, que ce n’est pas le sien. Ceci bien que il soit annoté sur le livret de famille, mais il faut replacer les choses dans le contexte du moment.

A voir sa tête, Camoz est perplexe devant ma réponse.

Que veux-tu dire, rétorque t-il ?

Et bien à l’époque, son frère Robert, sans le sou, était sous le toit de Yves quand celui-ci a quitté le domicile conjugal. Et quand il est revenu un an plus tard, un enfant était là et comme il n’avait pas fait de demande de divorce, il s’ensuivit une reconnaissance automatique dénoncée par la suite par Yves le jour de son divorce. Ce qui est écrit sur le rendu du divorce en question. Tu vois ce que je veux dire ? Pour te dire, un jour les gendarmes sont venus chez lui. Ils cherchaient le fils pour des conneries qu’il avait fait. Ils se sont fait remballés, ni une, ni deux, par Yves. Maintenant je comprends que sa fille ne veuille pas faire, faire une analyse, car c’est quand même son frère, même si celui-ci n’est pas du même géniteur.

Toutefois, tu remarqueras qu’il est curieux qu’un enfant de quarante six ans n’ait pas cherché à voir son père. Que malgré son bagage intellectuel d’un niveau d’ingénieur, il se retrouve dans des situations inextricables et je ne te dis pas tout. Le plus drôle, c’est qu’il donne une fausse adresse pour ses correspondances qui se trouve être dans un milieu HLM. Personnellement, Yves me fout dans la merde aujourd’hui. Je lui ai promis de protéger sa famille, mais laquelle ?

Puis un silence s’ensuivit de manière pesante. La chaleur qui soulève des sueurs et des suspicions sur ce dossier s’empresse à nos esprits, quand tout à coup, Camoz relève sa tête. Son regard est lumineux et l’on voit qu’une décision ferait suite.

Ecoute, me dit-il, on ne va pas s’embêter. Sa femme ne comprend pas bien ce que je lui explique. Alors je compte sur toi pour m’aider. Ayant l’usufruit, elle ne risque rien. Elle doit se réjouir et profiter de cette situation. Elle doit faire le mort. Il ne faut pas qu’elle se lance dans des contestations. En plus, que ce soit la fille ou le fils en question, ils n’ont pas de quoi payé les droits de succession. Ils ne peuvent que compter que sur la vente du bien en question. Or, sa femme Madeleine, je ne la voie pas mettre en vente et courir après un logement, au vu de son âge. Ceci pour faire plaisir aux enfants dont l’un n’a jamais fait part d’un sentiment envers Yves ou d’une rencontre, sauf pour empocher quelques quatre vingt dix mille euros. En plus, toi ça t’arrange et te dégage de ce problème, même si tu seras toujours critiqué.

Sur ces dires, je lui coupe la parole.

Oh pour çà, mes oreilles sifflent encore.

Camoz, regarde sa montre, se lève et me dit.

Je te laisse cinq minutes pour lui expliquer pendant que je m’occupe de la progéniture. Ceci en espérant que cela se passe bien, bien entendu.

Mais qu’en sera t-il ?

 

Robert Paris.



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